Tendances food 2015 : de la main de Bouddha au taloa
Par Catherine Lasserre - 27 févr. 2015
Société

Peut-on parler de tendance en cuisine comme on parlerait de tendance en mode ? Les chocolatiers et pâtissiers lancent leurs collections signature, les grands chefs ne jurent que par le « produit du moment », et les dingues de food se ruent sur le dernier spot en vue. Qu'on se le dise, chaque époque a ses spécificités et les aliments, plats et concepts culinaires ne dérogent pas à la règle. Voici un petit panorama des tendances culinaires qui continuent, se consolident ou se profilent en 2015.

Crédits : DR - Académie du Goût

Le cromesqui : une coquette croquette

Vous avez roulé pour les boulettes, vous craquerez désormais pour les cromesquis. Cette petite croquette dorée renfermant un mets surprise liquide fait un retour fracassant depuis quelques années, même si cette dernière n'est jamais vraiment tombée aux oubliettes. Très à la mode dans la cuisine bourgeoise du XIXe siècle, le cromesqui a également tenu une place de choix dans Ma cuisine, livre d'Auguste Escoffier publié en 1934 dans lequel le roi des cuisiniers déclare dans l'une de ses recettes : qu'il faut « au moment de servir, les tremper dans une pâte à frire ordinaire […] ». Pâte à frire ou panure à l’anglaise ? Il semble que la deuxième option l'emporte.

C'est à la fin des années 1980 que le cromesqui retrouve ses lettres de noblesse en la personne de Marc Meneau, chef triplement étoilé à l'Espérance en Bourgogne, qui au détour d'une de ses nombreuses lectures culinaires, tombe sur une vielle recette d'une croquette fourrée de beurre fondu. Il décide alors de la moderniser et de la sophistiquer en lui donnant une petite forme cubique et en la garnissant de foie gras. Un succès qui perdure aujourd'hui grâce à son fils Pierre Meneau qui, depuis 2012 dans son restaurant Crom'exquis, propose en apéritif ou en entrée des cromesquis aux herbes, au lapin et ail, à l'andouillette et moutarde ou encore au caramel au beurre salé et à la pâte à tartiner pour le dessert. Les cromesquis, de petites bouchées à croquer.

Les baozi, ces brioches vapeur chinoises qui rendent baba

La déferlante des spécialités asiatiques se poursuit dans la Capitale avec un nouveau venu sur la scène culinaire : le baozi. Il s'agit de petits pains à base de farine de blé, de levure, d'eau (ou de lait) et d'une pincée de sucre ou de sel, farcis de viande ou de légumes, cuits à la vapeur dans des paniers en bambou. Originaires de Chine (bien qu'on en retrouve du Tibet au Japon en passant par les Philippines), ces petits pains blancs bien dodus salés ou sucrés sont très prisés dans l'empire du Milieu et ce, à toute heure de la journée.

Margot Zhang à qui nous avions déjà consacré un article sur les raviolis chinois du Nouvel an propose sur son blog Recettes d'une chinoise des recettes de baozi authentiques. On retrouve des baozi farcis au porc et à la ciboulette, au chou chinois et aux shiitakés, ou des baozi farcis de pâte de haricots rouges sucrés, d'une crème aux œufs ou de pâte de sésame noir. Mais Madame Zhang n'hésite pas à s'inspirer de la gastronomie française en livrant par exemple cette recette de baozi aux oignons confits et au vieux comté. Si la perspective de les faire vous-mêmes vous effraie, faites-vous une idée en dégustant les baozi « fusion » - au Stilton et à la cerise par exemple - d'Adeline Grattard qu'elle propose à emporter dans son ancien restaurant Yam'Tcha transformé en boutique-salon de thé. L'autre option street food, Siseng, ce nouveau spot parisien de cuisine fusion asiatique qui propose des bao burgers, des burgers composés de brioches vapeurs. La folie des baozi ne fait que commencer.

Crédits : DR - FotoliaBaozi, petits pains farcis cuits à la vapeur

La street food à la sauce régionale

Crédits : DR - CalucCaluc, magret de canard fumé, griottes

Et si la cuisine du terroir français opérait sa révolution dans la rue ? Devant l'hégémonie des food trucks à burger et des cantines de cuisine d'inspiration étrangères, certains chefs français ont eu à cœur de faire découvrir leurs recettes traditionnelles remises au goût du jour. Du côté de la cuisine de rue, on retrouve le Marseillais Fabien Rugi qui revisite à la sauce phocéenne le fameux Fish&Chips cher aux Anglais. Poissons issus de la pêche locale, aïoli gourmand et panisses bien dorés font le succès de ce Fishe'n'Shipe. Pour rester dans les saveurs provençales, ruez-vous chez Bagnard à Paris, la cantine dédiée aux pans bagnats bien garnis imaginés par Yoni Saada que nous vous avions déjà présentée dans un article en novembre dernier.

Crédits : DR - Caroline MignotTaloa confit de canard-coing

Partons désormais du côté de l'Aveyron avec la pascadou revisitée par deux acolytes aveyronnais qui l'ont « streetfoodisée » pour donner naissance à la Caluc, une galette vert fluo à base d'épinard, de persil, d'échalotes et de ciboulette garnie au choix de magret de canard et griottes ou de la fameuse truffade. Une sorte de wrap terroir qui fera concurrence au taloa, cette galette de maïs originaire du Pays-Basque que l'on garnit de fromage de brebis, de chistorra - cette saucisse au piment d'Espelette -, ou tout simplement de ventrèche. Julien Duboué propose sa propre version dans son restaurant A Noste à Paris. Chorizo, poitrine de porc/piquillos, confit de canard/coing, ou encore taloa nutella/fruits secs caramélisés sont au menu pour une dégustation uniquement à emporter. Peut-être l'un des meilleurs sandwichs parisiens selon la journaliste gastronomique Caroline Mignot du blog Table à découvert. Quand la street food joue avec les saveurs du terroir, cela fait des étincelles...

La folie des agrumes : du kumquat au citron caviar

Yuzu par-ci, combava par là. Depuis quelque temps impossible de ne pas entendre le nom de ces agrumes dans les concours culinaires télévisés ou de les voir apparaître sur la carte d'un restaurant. Si le citron, l'orange, la lime, et autres hybrides comme le pomélo et la clémentine n'ont plus de secrets pour vous, le kumquat et le citron caviar restaient jusqu'alors de parfaits inconnus. Mais l'attrait pour la cuisine japonaise et asiatique en générale – n'oublions pas que la plupart des agrumes sont originaires d'Asie - ont permis de révéler au grand public ces agrumes étonnants et détonants. Le yuzu, né d'un croisement entre la mandarine sauvage et le citron, est un agrume jaune très parfumé à l'aspect bosselé, on utilise aussi bien son jus que ses zestes. Contrairement au combava, un agrume originaire d'Indonésie, dont seuls les zestes légèrement amers sont utilisés, sa chair étant trop acide.

Dans la catégorie poids plume, le kumquat, cet agrume mesurant à peine 5 cm, a la particularité d'avoir une peau comestible en plus d'avoir une saveur très douce. Confit, il est juste délicieux. Dans la catégorie ovni au prix corsé, on trouve d'un côté le citron caviar (70€ les 12 pièces), agrume longiligne originaire d'Australie renfermant des vésicules remplies de petites billes à la fois acides et amères qui explosent en bouche, et de l'autre la main de Bouddha (60€ les 3 pièces), une variété de cédrat qui a la forme de longs doigts à la peau épaisse et dépourvue de chair et de pépins au doux parfum de citronnelle. Ces agrumes parfument à merveille poissons blancs (en tartare ou en carpaccio), crustacés, salades sans oublier les desserts (gâteaux, entremets, tartes, sorbets, etc.). L'agrume nouveau est arrivé.

Crédits : DR - FotoliaMain de Bouddha

Quand les légumes se muent en confiserie

Le chocolat et sa pointe de sel de Guérande, un tantinet gentillet. Pour émoustiller le tout, certains maîtres-chocolatiers n'hésitent plus à intégrer des saveurs inattendues dans cet anti-dépresseur naturel. Nicolas Cloiseau, MOF chocolatier et surtout responsable de la création à la Maison du Chocolat, a imaginé une gamme de chocolat aux légumes qui répond au doux nom d' « Esprit salé ». Ganache au chocolat noir et compotée de poivron rouge relevée de piment d'Espelette, ganache au chocolat au lait et oignons blancs infusés, praliné amande-noisette aux éclats d'olives noires et praliné noisette aux cèpes séchées, quatre chocolats aux saveurs inédites pour une expérience gustative hors du commun à découvrir dès le mois de mai en boutique.

Mais les légumes ne peuvent-ils pas exister par eux-mêmes ? Jacques Genin, autodidacte passé par la cuisine et la pâtisserie avant de se reconvertir avec brio dans le monde de la chocolaterie et de la confiserie, s'est laissé aller à une fantaisie sucrée : les pâtes de légumes. Carotte, tomate, fenouil, navet, poivron, concombre, betterave composent ces confiseries originales réalisées à partir de leur jus frais et fait maison dans le laboratoire situé au sous-sol de sa boutique. Des pâtes de légumes que vous retrouverez en boutique au printemps prochain avec une nouvelle gamme de produits de saison. Vous doutiez encore que les légumes pouvaient être gourmands ?

Crédits : DR - Caroline FaccioliChocolat noir-poivron
Crédits : DR - Caroline FaccioliPraliné-olives noires
Crédits : DR - Caroline FaccioliPraliné-cèpes séchées
Crédits : DR - Caroline FaccioliChocolat au lait-oignons blancs

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