Guillaume Sanchez : rencontre avec un pâtissier iconoclaste
Par Victoria Houssay - 25 sept. 2014
Portrait

Faut-il vraiment étiqueter Guillaume Sanchez « pâtissier punk » ? De punk, il a les tatouages et le look. Il a aussi la fulgurance : à 23 ans, il a déjà ouvert deux lieux, préparé un livre - des recette mais pas que -, participé à une émission culinaire à forte audience et bousculé un bon nombre de codes de la pâtisserie classique. Il y a aussi cet attachement à l’efficacité, à la simplicité : dans l’esthétique de ses créations comme dans le respect du produit. Mais la technique de Guillaume, sa précision chirurgicale quand il s’agit de dosage (il ne goûte pas et se guide à l’odorat) ont une rigueur toute classique.

Crédits : DR - L'Atelier Noir - Guillaume Sanchez

Alors, punk ou pas punk ? Autant vérifier auprès de l’intéressé. « Ça a un côté "pubard" de dire ça, c’est trop facile : aujourd’hui tout le monde est tatoué. Je ne mets pas de têtes de mort sur mes gâteaux », tranche-t-il. Concernant le nom de son "Atelier Noir", un lieu qu’il a ouvert en 2013, le choix de la couleur fait d’avantage écho à l'esthétique minimaliste et monochrome qu’à un blouson noir. « La pâtisserie est un moyen d’expression au même titre que le graphisme, la musique, le street art, je le pense depuis plus de dix ans », précise-t-il. Un pâtissier artiste ? Evidemment, puisque « le visuel parle avant le goût ».

Casser les codes pour inventer la pâtisserie de demain

« Dans l’art gastronomique, il manque une vision novatrice. Il faut passer par d’autres chemins, casser les codes et le cérémonial français, les serveurs-pingouins qui te récitent un poème quand tu reçois ton assiette », observe-t-il. L’idée de Guillaume, pour la gastronomie de demain : tout recentrer sur le plaisir, que la complexité d’un lieu se retrouve dans la technique et non dans le service. Et si le pâtissier avoue sans peine ne pas puiser ses influences chez les pâtissiers de sa génération, et encore moins de celle d’avant (« un Saint-Honoré, ça m’emmerde », sourit-il), il ne la joue pas solitaire pour autant. On l’a vu au festival Tous à Table aux côté de Cyril Lignac et David Toutain et il sera au Salon du Chocolat. Il donnera également un coup de pouce à l’association Movember à l’occasion d’un événement chez Colette. L'occasion de découvrir ses créations percutantes qui mêlent sans complexe sucré et salé, comme une meringue shiitake au praliné amer et chocolat noir intense. « Dans mes pâtisseries, j'utilise beaucoup d'ingrédients qu'on retrouve dans le salé, comme les champignons. Sans sel après cuisson, ce n'est pas un produit salé... C'est un ingrédient riche en glucose, qui a des notes de fumé intéressantes », explique-t-il.

Crédits : DR - L'Atelier Noir - Guillaume Sanchez
Crédits : DR - L'Atelier Noir - Guillaume Sanchez
Crédits : DR - L'Atelier Noir - Guillaume Sanchez
Crédits : DR - L'Atelier Noir - Guillaume Sanchez

Entrepreneur, mais avant tout créateur

Crédits : DR - L'Atelier Noir - Guillaume Sanchez

Guillaume Sanchez a du talent, des idées, et de l’ambition. « Je ne voulais pas forcément entreprendre, être patron. Je voulais être chef, mais je me suis rendu compte que c’est aberrant de créer pour quelqu’un d’autre », nous explique-t-il. « Pour moi, quand tu fais une création, on te fait entièrement confiance, on ne te donne pas un cahier des charges ». Pas grave, Guillaume lance le Horror Picture Tea, un projet ambitieux mais éphémère. Avec le recul, il reconnait qu’il était un peu jeune – il avait 19 ans – pour gérer une telle entreprise. Il aura au moins commencé à se faire connaître. Aujourd’hui, on le retrouve derrière l’Atelier Noir, où il donne des cours de pâtisserie. « J’ai appris pendant six ans auprès des compagnons du devoir », explique-t-il, « je commence à prendre du plaisir à transmettre ce que je sais faire, ma technique ». Des projets, il en a plein les poches pour les prochains mois ou les prochaines années : une boutique, un bar-tapas avec des produits de qualité, et ce fameux livre, un bel objet qui sortira mi-décembre.

Livre de photo, carnet de voyage, recueil de recette : entre cuisine et art de vivre, l’ouvrage défriche les habitudes liées à la cuisine aux quatre coins du monde, du fin fond de l’Europe de l’Est à la frontière Irakienne. D’autres chefs ont collaborés à l’ouvrage, à l’instar d’Ophélie Bares, avec qui il a participé à Qui sera le prochain grand pâtissier ? et aux côtés de laquelle il prépare les Championnats du Monde de pâtisserie pour 2016. Un nouveau pour défi pour un pâtissier prometteur.

lateliernoir.com - 14, rue Muller 75018 Paris

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