Eugène : la pâtisserie light qui envoie du lourd
Par Catherine Lasserre - 24 avr. 2015
Adresse gourmande

Ouverte depuis décembre 2014, la boulangerie-pâtisserie Eugène ne désemplit pas. Son credo : allier santé et gourmandise en réduisant, à portion congrue, la quantité de sucre et de beurre dans ses pâtisseries et viennoiseries. Une aubaine pour les gourmands de tout poil, en particulier les diabétiques, qui peuvent enfin se régaler sans culpabiliser.

Crédits : DR-Kris MaccottaDevanture de la pâtisserie Eugène

Christophe Touchet, gourmand invétéré et accessoirement diabétique, a imaginé une boulangerie-pâtisserie-chocolaterie où gras et sucre seraient - presque - bannis. Un concept niche qui fait mouche d’autant que le pourcentage de diabétiques en France ne cesse de croître au fil des années, les autorités parlant même d’épidémie. Fin 2014, naissait donc Eugène, boulangerie d'un nouveau genre axée autour de quatre problématiques : réduire le taux de sucre de 50 %, jouer sur l’effet de satiété en intégrant des fibres solubles qui limitent les pics glycémiques et évitent le grignotage, privilégier les produits à indice glycémique faible et opter pour des substituts au sucre et au beurre comme les huiles végétales ou le sirop d’agave. Un projet qui aura mis trois ans à mûrir dont quatre mois de production et de tests intensifs - avec le concours de quatre pâtissiers de l’Ecole Nationale Supérieure de la Pâtisserie à Yssingeaux -, pour mettre au point tartes, pains, chocolats et autres viennoiseries.

« Manger en culpabilisant, ce n’est pas bon »

La pâtisserie Eugène, un repaire de diabétiques ? « La moitié de la clientèle ne l'est pas ! », souligne Christophe Touchet, précisant que certains sont intéressés par le concept, d’autres par l'idée de garder la ligne tout en se faisant plaisir ou par prévention en réduisant leur consommation de sucre (compte-tenu de leur prédisposition au diabète). Mais ceux touchés par cette maladie ou ayant des proches diabétiques savent combien la gourmandise peut être une frustration. Manger en culpabilisant n'est certainement pas la solution, aime rappeler le fondateur d'Eugène. Des ajustements sont alors nécessaires pour éviter une trop forte concentration de sucre dans le sang (glycémie) et des situations d'hypothermie.

C'est pourquoi Christophe Touchet et ses pâtissiers se sont entourés de professionnels de la santé (biologistes et diététiciens) pour trouver des alternatives. Les huiles végétales (huile de noisette ou de pépins de raisin) remplacent pour moitié le beurre dans les viennoiseries. Une formule qui n'altère en rien le feuilletage parfait du croissant par exemple et ce, sans que le papier ne soit imbibé de gras ! Le cacao Grand Cru Valrhona est lui sucré avec du maltilol, un édulcorant très faible en calorie qui laisse s'exprimer tout le parfum du cacao et côté pâtisserie, le sirop d'agave se substitue au sucre raffiné. C'est en goûtant les pâtisseries d'Eugène que l'on se demande pourquoi il y a tant de sucre et de matières grasses dans les pâtisseries ordinaires, tant leur présence semble, au final, superflue. « Le sucre est un masquant », renchérit le fondateur d'Eugène, et force est de constater qu'il n'a pas tort. On a l'impression de retrouver le goût des aliments, à l'instar de l'éclair à la framboise où la saveur de ce fruit rouge se révèle en toute simplicité et sans artifice. Au passage, mention spéciale à la savoureuse tarte au citron.

Crédits : DR-Catherine LasserreLa gamme de pâtisseries d'Eugène début avril

Des techniques gourmandes et astucieuses

Mais la réflexion ne s'arrête pas là, « il faut comprendre l'environnement dans lequel est intégré le sucre », explique Christophe Touchet : pour compenser le manque de sucre, son équipe a choisi d'opter pour des purées de fruits sans sucres ajoutés et pour les épices (vanille, cannelle...). Le Manhattan, un petit Mont-Blanc revisité est élaboré à partir d'une purée de marron complétée par une purée de mandarine-passion sans sucre également. Pour garantir des produits moins riches, ces derniers ont trouvé des substituts astucieux pour garder le côté gourmand des pâtisseries. Par exemple, la chantilly, trop grasse car généralement faite avec de la crème à plus de 30 % de matières grasses, est remplacée, chez la pâtisserie Eugène, par du lait additionné de pectine, un épaississant d'origine végétale. Une belle trouvaille qui donne à cette néo-chantilly une texture aérienne et un petit goût de yaourt glacé qui sublime leur Saint-Honoré.

Enfin, pour garantir des douceurs rassasiantes, l'équipe a décidé d'introduire des fibres solubles, qui en plus de maintenir un taux de sucre stable et de limiter l'absorption de sucres chez les diabétiques, jouent sur la sensation de satiété. « Les fibres compliquent le travail mécanique du passage du sucre dans le sang, l'assimilation est donc lente », précise le docteur Renan Roussel, diabétologue à l'hôpital Bichat à Paris (XVIIIe). Ainsi, le son d'avoine, la farine de lentilles et la farine bise (meulée à la pierre) sont les trois ingrédients de base à indice glycémique faible et riches en fibres permettant de faire les pâtes à tarte, les pâtes à choux et les viennoiseries. A noter que la pâte à choux sert également de base pour faire des sandwichs salés.

Crédits : DR-Catherine LasserrePains et viennoiseries
Crédits : DR-Catherine LasserreVitrine intérieure
Crédits : DR-Catherine LasserreAssortissement de mendiants
Crédits : DR-Kris MaccottaSandwichs-éclairs

Le choix des ingrédients a bien été pensé pour que leur interaction soit bénéfique et efficace sur le plan nutritionnel et glucidique. Le thé matcha (qui parfume les petits brioches) et la fleur de cactus (présente dans l'éclair à la framboise) sont deux aliments favorisant la stabilisation, voire la baisse de la glycémie grâce à leur forte concentration en fibres solubles. « C’est une véritable démarche culinaire associée à une approche technique pour rivaliser avec les boulangeries traditionnelles », explique Christophe Touchet, pour qui rester gourmand est le maître-mot. L'autre impératif, être transparent : le pain est sans additif (l'acide ascorbique chimique est remplacé par des extraits d'acérola, une baie riche en vitamine C aidant à faire lever la pâte) et tous les produits sont faits maison et sur place avec des produits qui changent au fil des saisons. La pâtisserie Eugène offre une gamme réduite de pâtisseries et de viennoiseries, et même si ces produits sont plus petits qu'a l'accoutumée, cela n'enlève en rien au plaisir, bien au contraire. Cela conduit même à être raisonnable : une bonne chose quand refréner ses ardeurs gourmandes est une mission quasi impossible.

Pâtisserie Eugène

  • 11, rue Guillaume Tell, 75017 Paris (métro Porte de Champerret)

    • Tél : 01 42 27 65 24

    • Rendez-vous sur leur site web ou leur page Facebook

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