Fait maison, Maître Restaurateur ou Restaurant de qualité : on vous dit tout sur les différents titres et labels
Par Académie du Goût - 22 sept. 2014
Société

Depuis son entrée en vigueur en juillet 2014, le label Fait maison provoque des remous. Trop laxiste, pas assez encadré, peu restrictif, sa fiabilité est remise en cause aussi bien par certains restaurateurs que par le consommateur. Ce petit pavé jeté dans la mare aura permis de mettre en lumière d'autres titres et labels encore peu connus du grand public. Petit tour d'horizon de ces différentes appellations pour vous guider.

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La label Fait maison : la déception ?

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Cet été, le label « Fait maison » du ministère du Commerce et de la Consommation a beaucoup fait parler de lui. Trop permissif, pas assez transparent, il ne répond pas aux attentes des consommateurs. Et pour cause ! Des carottes vendues émincées, une sauce en poudre ou une pâte à tarte industrielle sont autant d’éléments qui passent entre les mailles du filet du fait maison. Idem pour le surgelé (bien qu'il en existe de qualité). Plus précisément, le décret n° 2014-797 du 11 juillet 2014 relatif à la mention « fait maison » stipule que les produits « n'ayant subi aucune modification importante, y compris par chauffage, marinage, assemblage ou une combinaison de ces procédés » sont éligibles au fait maison, tous comme des produits « épluchés, à l'exception des pommes de terre, pelés, tranchés, coupés, découpés, hachés, nettoyés, désossés, dépouillés, décortiqués, taillés, moulus ou broyés, fumés, salés » et/ou « réfrigérés, congelés, surgelés, conditionnés sous vide ».

Pourtant, pour bien des consommateurs, le fait maison est préparé avec des produits frais, de saison et du coin. Le décret est clair, il faut que les plats soient préparés : sur place, avec des produits bruts. Le consommateur peut, en plus, se faire avoir facilement par des appellations non encadrées : « riz au lait à l’ancienne », « tarte tatin façon grand-mère », « mousse au chocolat artisanale »… L’emploi de ces qualificatifs n’est pas encadré. La seule exception ? Les frites, qui doivent être faites maison de A à Z. C’est déjà un début. Dommage que la loi ne soit pas plus ferme : en Italie par exemple, les produits surgelés sont systématiquement signalés sur la carte.

Maître Restaurateur, le seul titre officiel reconnu par l'Etat

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Dans le communiqué de presse de ce fameux décret n° 2014-797 du 11 juillet 2014 relatif à la mention « Fait maison », Carole Delga, secrétaire d’Etat chargée du Commerce, de l’Artisanat, de la Consommation et de l’Economie sociale et solidaire, souligne le fait que ce label « vient compléter efficacement le titre de Maître Restaurateur ». Et d'ajouter : « Ces deux dispositifs […] s'inscrivent dans une dynamique de qualité et de transparence permettant de valoriser l'ensemble du secteur et de mieux informer chaque consommateur ». Une affirmation qui laisse perplexe. Le label Fait maison aura en tout cas eu le mérite de mettre un coup de projecteur sur le titre de Maître Restaurateur, qui était jusqu'alors inconnu du grand public. « J’ai l’impression que le label fait maison dope le titre de Maître Restaurateur », nous confie Jean-Marie Gervais, premier détenteur du titre Maître Restaurateur en 2008 avec l’Auberge du Val de Vienne. Et de poursuivre : « il n’y a pas assez de Maîtres Restaurateurs en France, en partie dû au manque de communication sur ce titre, il y une méconnaissance de cette certification ». Aujourd’hui, la France compte plus de 3000 Maîtres Restaurateurs.

Ce titre, fruit de l'initiative du Ministère des PME, du Commerce et de l’Artisanat dans le cadre du Contrat d’avenir de la restauration, est le seul délivré par l’Etat. Impulsé en 2007, ce titre a pour ambition de valoriser le métier de restaurateur et de « permettre au consommateur d’identifier les restaurateurs de métier, et de les sécuriser sur la nature de la prestation ». En 2010, naissait l'Association Française des Maîtres-Restaurateurs (AFMR) qui fédère plusieurs entités, parmi elles, les Restaurateurs de France (voir ci-dessous) et Cuisineries gourmandes, les associations fondatrices. Ce titre officiel garantit une cuisine 100 % fait maison, du bistrot du coin au restaurant étoilé. La valeur ajoutée : travailler des produits bruts et frais pour la majorité. « Enfin de la transparence et pas de copinage », renchérit Jean-Marie Gervais qui insiste sur le fait qu’il s’agit de la première certification délivrée par l’Etat. « C’est un grand combat mené par la profession pour différencier ceux qui travaillent réellement le produit de ceux qui ne font que réchauffer », ajoute-t-il.

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Francis Attrazic, président de l’AFMR « milite depuis toujours pour la protection de la restauration traditionnelle, être Maître Restaurateur est un acte de foi : un engagement pour la qualité, un respect du client et un amour de la gastronomie ». Depuis l’obtention de son titre, Jean-Gervais observe un changement de comportement chez ses clients qui sont interpellés par ce titre, « ils sont curieux, ils se demandent pourquoi cela n’est pas fait ailleurs ». Pour ce Maître Restaurateur, le partage est une valeur intrinsèque : « on est là pour le partage de la nourriture et de la vie, on n’est pas une usine à pognon. Les gens sentent la qualité surtout quand c'est fait avec votre cœur et votre ventre ». Ce titre tend à valoriser aussi bien ce qu'il y a dans l'assiette qu'autour de l'assiette : service en salle, sécurité, hygiène, etc. Le cahier des charges est assez clair : outre le non-recours aux plats préparés, un personnel qualifié et soigné, un service attentif et efficace, ainsi qu'un établissement propre et bon état sont les autres critères pris en compte pour délivrer ce titre. Le CAP ou le BEP sont les diplômes requis mais une expérience professionnelle de 10 ans en tant que restaurateur peut faire foi. « Le titre est un critère de sélection dans la recherche d’un restaurant de qualité, et l’assurance d’avoir affaire à un restaurateur confirmé : un véritable contrat de confiance » poursuit Francis Attrazic sur le site de l’association. Ce titre est à renouveler tous les 4 ans auprès d’un audit indépendant moyennant 600 euros. « Je suis le premier, je dois donner l'exemple », ajoute Jean-Marie Gervais qui veut aussi changer l’appellation : « Maître Restaurateur est un peu pompeux, je pencherais plutôt pour Artisan restaurateur ».

Restaurateurs de France, un label national reconnu

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Restaurateurs de France est un label officiel reconnu en 1999 par l’Etat, plus précisément par le ministère du Tourisme. Créé par des restaurateurs souhaitant promouvoir le patrimoine culinaire français, ce label s'attache à mettre en avant la cuisine traditionnelle française et les produits du terroir. Plus de 400 établissements y sont aujourd’hui affiliés. Le label Restaurateurs de France, présidé par Eric Briones depuis février 2014 - chef du restaurant Les 3 Ducs en Côte-d'Or - répond à une charte qualité stricte qui n’est pas sans rappeler celle du titre de Maître Restaurateur : qualité des produits et de l’accueil, expérience professionnelle reconnue, traçabilité, hygiène, sécurité. Plus de 85% des clauses sont en adéquation avec les critères définis par le titre de Maître Restaurateur. Des établissements qui sont audités tous les trois ans par un organisme indépendant. Pour le président, le label Restaurateurs de France « se dresse comme la véritable garantie qu’attendent les consommateurs, puisque nous offrons de vrais produits frais, concoctés de A à Z dans nos cuisines ». Une garantie de plus pour le consommateur de se voir servir des plats 100% faits maison.

Restaurant de Qualité, le label des Grands Chefs

Crédits : DR - Collège culinaire de FranceLogo des Restaurateurs de qualité

Les chefs étoilés, figures de proue du patrimoine culinaire français montent eux aussi au créneau. Le 8 avril 2013, naissait Restaurant de qualité, un label reconnu et initié par le Collège Culinaire de France, une entité co-présidée par Alain Ducasse et Joël Robuchon, eux-mêmes membres fondateurs de ce collège aux côtés de treize autres grands chefs étoilés. Pour eux, la gastronomie française est en péril. Pour la sauver, ils ont mis en place ce label pour créer un réseau et ainsi soutenir et valoriser la profession. Ce qui les fédère : leur combat pour la qualité et la transparence. Ils prônent eux aussi une cuisine entièrement faite sur place et élaborée à partir de produits bruts et de qualité dont la traçabilité, un « enjeu fondamental », est assurée. Car selon ces chefs c'est un devoir de citoyen d'aider les autres cuisiniers. Critères qui s'adressent à tous les restaurateurs et cuisiniers, étoilés ou non, connus ou non.

A ce jour, pas moins de 800 restaurants sont estampillés « Restaurant de Qualité », choisis par 150 chefs référents nommés dans chaque région qui identifient et contrôlent les candidatures. Le dernier mot revient toutefois aux chefs fondateurs. Ceux qui se définissent comme des « militants de la qualité » ne veulent pas céder à « l’uniformisation du goût ». En juillet dernier, le premier collège culinaire en région fut inauguré en Ile-de-France. Le but : promouvoir leur démarche pour étendre le réseau à l'échelle nationale. Le 21 septembre dernier la région PACA accueillait ce collège culinaire, et le 29 septembre prochain, ce sera au tour de l’Aquitaine. Le militantisme culinaire est en marche.

Aux côtés de ces titres et autres labels s'ajoutent, dans un tout autre registre, les guides gastronomiques et les annuaires culinaires pour orienter le choix du consommateur. Un tri sélectif opéré par des journalistes et/ou critiques gastronomiques qui attribuent des notes pour le compte d'institutions comme le Guide Michelin, le Gault et Millau ou encore le Bottin Gourmand - ou pour leur compte comme Gilles Pudlowski avec son Guide Pudlo ou encore Caroline Mignot et son guide Mignot. Des alternatives qui ne se basent pas sur un cahier des charges comparable aux titres et labels évoqués plus haut mais dont la notoriété des auteurs ou institutions - vertement critiquées - est souvent gage de qualité.

Ce petit passage en revue montre que ces différents titres et labels, hormis le Fait maison, se basent sur les mêmes critères pour proposer une cuisine de qualité à leurs clients. Des dispositifs nécessaires pour se repérer dans la fourmilière des milliers de restaurants mais dont la multiplicité risque de dérouter bon nombre de consommateurs, malgré les critères de qualité et de transparence mis en avant.

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